Crise humanitaire : l’ONU demande aux États de surseoir au rapatriement forcé des Haïtiens

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Les violations systématiques des droits et la violence armée incessante ont précipité Haïti dans sa « pire situation des droits de l’homme et humanitaire depuis des décennies », a souligné le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. Dans un contexte le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, appelle aujourd’hui les États de la région et au-delà à suspendre les renvois forcés de Haïtiens vers leur pays.

“La violence, et notamment les violences sexuelles, les enlèvements, les pillages et les barrages routiers opérés par des bandes armées, ainsi que la récente épidémie de choléra, ont exacerbé une situation humanitaire déjà très grave en Haïti, marquée par une insécurité alimentaire aiguë, des pénuries de carburant, ainsi que des soins de santé et des installations d’assainissement limités. Des millions d’enfants sont dans l’impossibilité de fréquenter l’école, souffrent de malnutrition et vivent dans la peur”, a exposé le HCR dans un communiqué sur la situation humanitaire d’Haïti, rendu public jeudi 3 novembre 2022.

« Face à cette situation très préoccupante, je lance un appel à tous les États pour qu’ils soient solidaires de Haïti et les exhortent à ne pas renvoyer de force les Haïtiens vers ce pays extrêmement fragile, a demandé Filippo Grandi, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés. Les femmes, les enfants et les hommes haïtiens qui se trouvent à l’extérieur du pays et qui sont renvoyés de force en Haïti peuvent être confrontés à des risques sécuritaires et sanitaires potentiellement mortels, ainsi qu’à de nouveaux déplacements à l’intérieur du pays.»

Le renvoi forcé de personnes vers un endroit où elles risquent d’être persécutées, torturées ou de subir d’autres dommages graves ou irréparables équivaudrait à un « refoulement », ce qui est explicitement interdit par le droit international des réfugiés et des droits de l’homme”, précise le communiqué dont une copie a été acheminée au journal. Le droit international interdit également les expulsions collectives et la détention arbitraire qui y est associée.

Le HCR rappelle aux États que les Haïtiens qui souhaitent demander une protection internationale doivent avoir accès à des procédures d’asile équitables et efficaces. Le HCR appelle également les États à mettre fin au renvoi forcé de ressortissants haïtiens dont la demande d’asile a été rejetée avant les événements récents. Il s’agit de personnes qui n’avaient peut-être pas besoin de protection internationale auparavant, mais pour lesquelles l’évolution de la situation en Haïti constitue une base nouvelle leur permettant d’introduire une demande d’asile”, poursuit le communiqué.

Compte tenu de la situation catastrophique actuelle que connait Haïti, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés dit encourager les gouvernements à veiller à ce que les Haïtiens aient accès à des services de protection et de soutien, quelles que soient les raisons pour lesquelles ils ont quitté leur pays. “Pour ceux qui ne sont pas éligibles à l’asile, cela peut se faire par l’octroi d’une protection complémentaire, d’une protection temporaire, d’une admission humanitaire ou par d’autres dispositions de séjour légal jusqu’à ce que la situation sécuritaire en Haïti permettre des retours en toute sécurité”, a souhaité HCR. Par ailleurs, le HCR dit collaborer avec le gouvernement haïtien, les organisations de la société civile et les acteurs du secteur privé afin de promouvoir un avenir pacifique, sûr et prospère pour le pays.

Jusqu’à ce jour, la République dominicaine est le pays qui a renvoyé le plus de migrants haïtiens, pour des raisons diverses lorsqu’ils sont en situation irrégulière. Dans un rapport publié le mardi 6 septembre, le Groupe d’appui aux rapatriés et aux réfugiés (GARR) a indiqué que 18 872 migrants haïtiens étaient retournés dans leur pays. Ces chiffres ont été revus à la hausse.

Selon les statistiques de l’Organisation internationale pour les migrations, consulté par le journal, de septembre 2021 à avril 2022, près de 21 000 migrants ont été expulsés des Etats-Unis vers Haïti. Rien que pour le mois d’avril 2022, près de 3 000 migrants haïtiens ont été rapatriés en Haïti via l’avion par les autorités américaines. À Cuba, de janvier à avril 2022, quelque 1 057 Haïtiens ont été expulsés avec notamment 413 expulsions pour avril. 

L’administration Biden part à l’offensive

L’administration Biden évalue les options pour répondre à ce qui pourrait bientôt être un exode massif de migrants haïtiens après la crise de carburant qui sévit dans le pays. Le 30 octobre 2022, NBC News a rapporté que l’administration américaine a rédigé un document de politique générale accordant à l’exécutif le pouvoir de détenir des immigrants haïtiens à Guantánamo Bay, où le gouvernement a emprisonné et torturé des centaines de personnes sous les auspices de la «guerre contre le terrorisme».

Selon le document, le Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche a demandé au Département de la sécurité intérieure quel nombre de migrants haïtiens exigerait que les États-Unis désignent un pays tiers, connu sous le nom de «nénuphar», pour détenir et traiter les migrants haïtiens qui sont interceptés en mer et quel nombre exigerait qu’ils soient emmenés à Guantánamo.

« Les Haïtiens et Haïtiennes qui fuient leur pays sur fonds de crise humanitaire et relative aux droits humains doivent être accueillis et ont le droit de venir chercher la sécurité aux États-Unis sans discrimination. Ils ne doivent pas être détenus dans un pays tiers ni dans une base de la marine américaine tristement célèbre pour sa pratique de la détention arbitraire illégale sans limite de durée et de la torture. » a dénoncé Erika Guevara-Rosas, directrice régionale d’Amnesty International pour les Amériques.’

Les Etats-Unis avaient déjà la base militaire de Guantánamo pour détenir les réfugiés haïtiens pendant les trois ans du coup d’Etat militaire de 1991.

Source: Le Nouvelliste

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