La dernière partie du rapport sur la gestion du fonds Petrocaribe remise au sénat et la CSC/CA fait des recommandations.
4 min readEn dépit d’un retard d’environ 11 mois, la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSC/CA) a finalement publié ce lundi 17 août 2020 la 3e et dernière tranche du rapport d’audit spécifique des fonds Pétro Caribe couvrant la période 2008 à 2016. Il a fallu attendre 14 mois pour voir arriver la dernière tranche du rapport de gestion des fonds Petro Caribe (La 2e tranche du rapport a été publiée en mai 2019, rappelons-le).
Le président de la Cour des Comptes, Rogavil Boisguéné, a évoqué les troubles sociopolitiques qui ont secoué le pays et la crise sanitaire mondiale découlant de la pandémie du COVID-19 pour expliquer ce retard lors de la remise du document au président du Sénat de la République ,Pierre François Sildor , arguant que les auditeurs de la Cour ont du se rendre dans plusieurs villes de province pour vérifier des sites censés accueillir des projets financés à partir des fonds du programme Petro Caribe.
Le document de 1067 pages de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSC/CA) fait état des irrégularités et révèle, sans fard, qu’il a eu détournement de fonds dans l’exécution de certains projets, ce au préjudice du projet et de la communauté.
En résumé tous les ministères, des institutions publiques autonomes dont l’OFATMA, l’EDH, la DINEPA, d’autres institutions comme le FAES et le CNE, des firmes privées nationales et internationales sont indexés dans ce rapport de la Cour des Comptes sur la gestion des fonds Petro Caribe de 2008 à 2016. Selon le rapport ce sont plusieurs millions de gourdes et de dollars américains qui ont été dépensés sans aucune possibilité de justifier ces dépenses.
A titre d’exemple, la CSC/CA affirme n’avoir trouvé aucun contrat, de décompte et de facture pour la mise en œuvre et l’exécution du projet « Appui à la restructuration du système de passeports » pour un montant de 3 millions de dollars américains (Page 16, résumé exécutif du rapport Petro Caribe).
Le projet en question a été initié par la Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales (MICT), lequel ministère a été incapable de fournir également des pièces justificatives pour l’acquisition de filtres à eau pour un montant global de 2 millions 58 mille gourdes. Autre exemple éloquent, des irrégularités décelées par la CSC/CA dans l’utilisation de 45 millions 304 mille 714 gourdes et 70 centimes ainsi que de 227 mille 255 dollars américains. Ajouté à d’autres irrégularités, 6 contrats sur 12 ont été accordés de gré à gré à une seule firme « Le Groupe IBI/DAA », INC.
Dans son rapport d’audit final, la Cour Supérieure des Comptes souligne des déficiences importantes relatives au processus de sélection de fournisseurs n’ayant pas garanti le principe de la transparence et le jeu de la concurrence, de contrats conclus en situation d’urgence sans justification pertinente, de projets attribués sans recours à des critères précis et évaluables objectivement, des projets ont été engagés à l’étape de la conception sans une évaluation des besoins et l’estimation des coûts entre autres irrégularités.
En guise de conclusion, la Cour des comptes recommande aux institutions publiques auditées de diligenter des enquêtes internes afin de déterminer la possibilité de recouvrer des sommes auprès des firmes et des administrateurs des fonds publics notamment dans le cas des irrégularités ayant causé préjudice à la communauté à savoir favoritisme dans l’octroi des contrats, décaissements non justifiés, retenue de 2% à la source (impôt sur le revenu) sur les acomptes provisionnels,
…mais non versés à la DGI ; D’engager la responsabilité des ordonnateurs qui se sont succédé à la tête des institutions et qui sont impliqués dans la gestion des fonds Petro Caribe pour avoir engagé l’État dans des transactions irrégulières dans le cadre de l’élaboration et / ou de la gestion des projets.
Au parlement, la Cour des Comptes recommande, à court terme, de mettre en place des mécanismes pour récupérer les fonds dilapidés dans des projets inachevés afin de permettre à Haïti de réduire éventuellement sa dette envers le Venezuela.
À moyen terme, d’opérer une réforme profonde sur l’encadrement de l’octroi et de la gestion des contrats pour la mise en œuvre des projets publics et à long terme, de revoir l’encadrement relatif à l’éthique et à la déontologie envers les élus et les serviteurs de l’État afin de favoriser une plus grande transparence dans la gestion des fonds publics.